Cette fois la dictature de la finance n’est plus une métaphore d’altermondialiste, la stratégie du chaos n’est plus une théorie de polémiste, c’est en vrai, dans les rues, au long des boutiques fermées, des ordures qui s’entassent, des taxis sans clients, des suicides qui se multiplient, des hôpitaux sans pansement, des quartiers sans lumière, des jeunes qui fuient le pays, des visages ravagés. 38 ans après la junte militaire, c’est la junte financière qui a pris le pouvoir en Grèce. (Voir la vidéo ci-dessous même si le son n’est pas terrible…)
Le peuple est désemparé, humilié et ne voit aucune issue à la situation actuelle. La Grèce est sous tutelle, coupable elle doit payer, coupable elle est à vendre. Cependant, il ne s’agit nullement d’une crise grecque qui se propage aux autres pays de la zone Euro. C’est une crise mondiale, européenne et finalement grecque. Nous sommes face à la crise d’un système : celui du capitalisme financiarisé et dérégulé!
Plutôt que de long discours pour expliquer comment nous en sommes arrivés là, je vous propose plutôt le vibrant appel aux peuples d’Europe fait récemment par Míkis Theodorákis qui fut le porte-parole de la résistance à la Dictature des colonels grecs de 1967 à 1974.
Lettre ouverte aux peuples d’Europe
« Notre combat n’est pas seulement celui de la Grèce, il aspire à une Europe libre, indépendante et démocratique. Ne croyez pas vos gouvernements lorsqu’ils prétendent que votre argent sert à aider la Grèce. (…) Leurs programmes de «sauvetage de la Grèce» aident seulement les banques étrangères, celles précisément qui, par l’intermédiaire des politiciens et des gouvernements à leur solde, ont imposé le modèle politique qui a mené à la crise actuelle. Il n’y pas d’autre solution que de remplacer l’actuel modèle économique européen, conçu pour générer des dettes, et revenir à une politique de stimulation de la demande et du développement, à un protectionnisme doté d’un contrôle drastique de la Finance.
Si les Etats ne s’imposent pas sur les marchés, ces derniers les engloutiront, en même temps que la démocratie et tous les acquis de la civilisation européenne. La démocratie est née à Athènes quand Solon a annulé les dettes des pauvres envers les riches. Il ne faut pas autoriser aujourd’hui les banques à détruire la démocratie européenne, à extorquer les sommes gigantesques qu’elles ont elle-même générées sous forme de dettes. Nous ne vous demandons pas de soutenir notre combat par solidarité, ni parce que notre territoire fut le berceau de Platon et Aristote, Périclès et Protagoras, des concepts de démocratie, de liberté et d’Europe. (…) Nous vous demandons de le faire dans votre propre intérêt. Si vous autorisez aujourd’hui le sacrifice des sociétés grecque, irlandaise, portugaise et espagnole [et italienne] sur l’autel de la dette et des banques, ce sera bientôt votre tour. Vous ne prospérerez pas au milieu des ruines des sociétés européennes. Nous avons tardé de notre côté, mais nous nous sommes réveillés.
Bâtissons ensemble une Europe nouvelle ; une Europe démocratique, prospère, pacifique, digne de son histoire, de ses luttes et de son esprit. Résistez au totalitarisme des marchés qui menace de démanteler l’Europe en la transformant en Tiers-monde, qui monte les peuples européens les uns contre les autres, qui détruit notre continent en suscitant le retour du fascisme. »
Míkis Theodorákis
En savoir plus
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