Ce crash qui ne vient pas

Je me retrouve exactement dans la même situation qu’à l’avant-veille de l’explosion de la bulle des techno en l’an 2000. Je suis cash et je n’encaisse rien. Face à cela je devrais me montrer somme toute assez satisfait car comme l’a déjà annoncé une vénérable banque suisse, il se peut qu’à un terme plus ou moins proche, cette banque répercutera les taux négatifs sur ses clients bien qu’elle dise en même temps ne pas y penser du tout (ça me fait toujours bien rigoler ce genre d’annonce débile). Autre hypothèse, je me dis elle pourrait choisir de faire répercuter très responsablement ses coûts sur le prix des articles de base que sa maison-mère vend (mais de cela elle n’en parle pas je le reconnais). Peut-être plus simple à réaliser en fait, car les consommateurs sont plus nombreux. Nous avons tous besoin de manger et la pilule passerait plus ou moins incognito, presque de manière indolore, et puis ça nous donnerait encore à tous le privilège de faire exploser notre cumul de points cumulus. Mais… et il y a un hic à cette théorie à deux balles. Et ce hic c’est la Coop….Car c’est elle qui se marrerait, sauf si bien entendu elle choisissait de copier le modèle de sa grande sœur « meilleure ». Mais quel débat passionnant je viens de lancer sans m’en rendre compte…

Je me rappelle bien de cette période. Deux ans avant l’explosion de la bulle des techno, j’étais sorti en masse des marchés, soit bien trop tôt. Mes performances étaient très confortables et j’avais l’impression d’avoir réalisé de belles affaires. Sauf que… L’appel du gain se manifestait presque chaque matin car je voyais les marchés monter, monter et monter encore. Et qu’ai-je fait? J’ai écouté ma tête de boc et non mon ventre. Et ma tête, avec ce qu’elle lisait partout, avec ce qu’elle comprenait, eh ben elle me disait que je m’étais planté et qu’il y avait plein de pognon à se faire. Donc j’ai réinvesti une partie de mes avoirs, ne supportant pas de voir ces marchés monter et d’être resté à quai comme un bourriquet, et bien sûr avec la finitude que l’on connaît. Je me suis retrouvé en slip, sur le quai, comme tant d’autres, complètement groggi et partiellement plumé.

Le parallèle avec la période que nous vivons? On attend le crash depuis au moins deux ans et il ne vient pas. Les marchés corrigent régulièrement de quelques pourcents pour ensuite reprendre le chemin des sommets. Nous venons de revivre ce petit scénario pour la 37ème fois en deux ans. On nous prédit le crash pour acquis, comme Roubini ou Faber depuis 2009 d’ailleurs, mais rien de cela à l’horizon. Les marchés se tiennent en lévitation à des hauteurs vertigineuses, la tête en bas. Le problème? C’est qu’une grande partie des acteurs n’est pas investie. Tout le monde n’attend qu’une chose: que les marchés s’encoublent dans le tapis pour enfin pouvoir sortir son cash et intégrer le rebond. Mais ça c’est dans un monde idéal. Car pour l’instant, je fais partie de la masse, avec du cash qui ne rapporte rien et la tentation extrême d’en réinvestir une partie en actions. Ma tête me dit que je devrais faire cela, car le joueur que je suis ne supporte pas de ne rien gagner. Mon ventre me dit au contraire de ne pas le faire. Et bien que l’envie de gagner suffisamment d’argent pour payer mon divorce d’abord et ensuite m’acheter mon Q7 de couleur gris Daytona me fasse réfléchir, je choisis d’écouter mon ventre. Mis à part quelques structurés émis sur des titres peu volatiles, je ne fais rien.

Il se peut fort bien que je rate le rallye qui peut-être viendra un jour. Peut-être que d’autres que moi choisiront d’emballer la machine en revenant dans les marchés je ne sais pas, à force d’attendre ce crash qui ne vient pas. Mais pour le moment il ne se passe juste rien. Nous vivons dans un monde où les banques centrales tiennent le monde entier à bout de bras. Et contrairement aux ressources de la Terre qui sont pour l’année déjà épuisées depuis deux jours, les banques centrales disposent du pouvoir magique de prolonger ce bull-market ad aeternam. Le crash ne viendra pas de sitôt j’en ai bien peur, même si les banques présentent plutôt une gueule à faire peur que Pat Hibulaire ne renierait pas. Le déclic pourrait venir… des banques centrales. C’est une hypothèse qu’il convient aussi de considérer. Car si comme par magie elles devaient tout à coup encore abaisser leurs taux et qu’on ponctionne ensuite… disons 5% d’intérêts sur les comptes épargne, j’en connais qui réfléchiront à deux fois. Comme moi par exemple. Ce que je veux dire par là, c’est que les mesures de rétorsion des banques ne sont pas (encore) suffisamment incitatives pour changer notre comportement. Patience peut-être et gardons cela à l’œil car cela pourrait bien venir un jour.

Donc pour faire bref, si je pense au pouvoir magique des banques centrales, ma tête me dit qu’il conviendrait de faire preuve de courage et de réinvestir ce cash qui ne rapporte rien aujourd’hui et qui coûtera peut-être demain. Et mon ventre me dit que tout cela n’est que rêvasserie d’enfant, de la pure fiction, et que ces marchés ne transformeront jamais une fontaine en chocolat en lingots d’or juste comme cela. Alors peut-être des marchés à la hausse encore et encore… peut-être… pour quelques pourcents, jusqu’à ce que le monde se dise (et même des journaux très sérieux comme Voici d’ailleurs): « c’est bon, cette fois il faut mettre le paquet ». Et c’est là que tout se joue, parfois en quelques semaines seulement, avec en parallèle une « euphorie » de masse mais pour quelques pourcents seulement, pour ensuite laisser la place à une baisse laser de quelques dizaines de pourcents. A bon entendeur.

 


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